Noël nippon décalé

Il existe des périodes, plus que d’autres où l’on s’aperçoit que l’on est loin de sa terre d’origine par la différence de culture et où il est moins agréable de se retrouver loin de ses proches. Noël en est l’exemple le plus flagrant pour moi tant cette fête revêt une importance capitale en Occident et qu’elle diffère grandement au Japon sur les coutumes comme sur les dates.

Commençons par le début avec les festivités qui se mettent en place. Les Japonais appréciant particulièrement les étapes datées qui rythment l’année, Noël succède directement à Halloween dès les premiers jours de Novembre. La nuit étant particulièrement précoce à cette saison, dès 17h le ciel est déjà bien sombre pour pouvoir déclencher l’allumage des décorations spéciales qui fleurissent dans les avenues, les centres commerciaux et autres plazzas urbaines. Quelques sapins se mettent en place par ci, par là et voir tous ces évènements limités attire la foule venue se balader malgré le bilan visuel que je ne trouve pas véritablement exceptionnel à l’image de la collaboration Disney-gare de Tokyo avec cette structure inspirée de "La reine des neiges" où aucun des personnages n’apparait…

J’ai pu aussi observer quelques marchés de Noël qui se servent plus du nom populaire qu’évoque cette appellation que du concept tant ceux-ci sont assez minimalistes. Seuls quelques chalets au nombre de 10 en moyenne, uniquement 3 à Ebisu…, font que l’on en fait le tour très rapidement. On trouve malgré cela ce bon vieux père Noël qui parcourt la Terre à la rencontre des gentils enfants, mais pas seulement.

Le décalage est évidemment horaire, du fait que l’Asie se réveille en premier dans le monde ce qui offre un petit privilège non négligeable à certaines occasions, mais pour Noël celui-ci est encore plus important car on peut le compter en jours ! Le pays n’étant pas particulièrement porté sur le christianisme donc la naissance de Jésus est anecdotique (oubliez la crèche de Noël), le 25 Décembre n’est ainsi pas un jour férié, des gens travaillent et des écoliers ont des activités. A partir de ce constat les conditions ne sont pas réunies pour que toute la magie du matin de Noël s’opère convenablement. Seul l’aspect ultra commercial est arrivé jusqu’à cette partie du monde alors heureusement, le concept du cadeau existe même si elle n’est pas si coutumière que cela. La question qui se pose est de savoir quand les offrir ? La réponse toute trouvée est le 23, le jour férié le plus proche qui correspond à l’anniversaire de l’Empereur, en place depuis 1989.

C’est à partir cette occasion que se dévoile le véritable visage du Noël japonais, une fête romantique ! En effet, c’est le soir idéal pour sortir avec son ou sa bien-aimé(e) afin de s’offrir un rendez-vous en tête à tête bien mérité durant cette période d’activité économique intense et surchargée pour tout un tas de profession. L’idée principale de ce repas est de se changer du quotidien en optant absolument pour un restaurant de type occidental et de troquer les baguettes habituelles pour la fourchette et le couteau, synonyme de gastronomie raffinée dont les restaurants italiens et français tirent leur épingle du jeu. C’est ainsi que l’on voit apparaître des menus spéciaux uniques de Noël les soirs du 23 et du 24 enchaînant minimum 5 assiettes : 2 hors d’œuvre, 1 plat de pâtes, 1 poisson, 1 viande, 1 dessert, café ; le tout cumulant aux alentours des 7000 yens (50 euros) hors boissons et atteignant environ 2 heures de repas, fait inhabituel dans la gastronomie nippone. Mais cela fonctionne bien et sans réservation, il y a tout intérêt à rappliquer tôt pour trouver une table libre.

Autre spécificité culinaire de la période des fêtes, et à défaut de pouvoir manger une dinde aux marrons, on se contentera ici de volaille panée, en l’occurrence des manchons de poulet. La chaîne qui règne en maître sur ce secteur pour les fêtes autour des 23-24-25 Décembre, c’est Kentucky Fried Chicken, ou KFC pour les intimes. Le colonel, personnage mascotte de la marque s’apparentant étrangement au père Noël, le concept commercial a fonctionné au Japon et l’on peut commander des boxs spéciales que l’on réserve à l’avance afin d’aller la chercher le jour du réveillon. Les magasins sont prêts à accueillir les clients avides de cette tradition étonnante qui provoque des files d’attente devant l’enseigne de restauration rapide.

Dernière spécialité et non des moindres, il n’y a pas de Noël au pays du soleil levant sans un bon gâteau. C’est vraisemblablement ce que l’on remarque le plus durant le quotidien des fêtes. Les gros gâteaux crémeux s’affichent partout dans la rue, les pâtisseries, les cafés, les étages alimentaires des grands magasins et même en devanture des supérettes conbini afin de s’adapter à toutes les bourses. Cela se prépare des semaines à l’avance car malgré la folie gourmande omniprésente, la rupture de stock n’est pas si loin alors autant le commander pour se faire livrer le dessert dans son magasin le plus proche. Ainsi dès Novembre, la chaîne 7-Eleven propose un catalogue qui met l’eau à la bouche avec ses noms et décorations bien français.

C’est ainsi que ça se passe au Japon, à travers ce petit tour d’horizon de la période des fêtes de Noël bien surprenante que j’ai pu expérimenter et vivre avec une connaissance proche, adaptée pour cette occasion ;)
Joyeux Noël à tous !