O-bon à Kyoto

Le 15 Août en France comme au Japon résonne comme un jour particulier sur le plan de la croyance. Hommage aux ancêtres, les quelques jours entourant cette date importante est appelée O-bon et est propice à quelques jours de repos dans la spiritualité et le calme. Il y a une ville qui se prête bien à ce retour aux sources dans l'harmonie, hors de la torpeur du rythme quotidien effréné, c'est Kyoto, ancienne capitale et typique d'un Japon ancien. C'est pour cette occasion que j'y ai passé ma semaine, d'autant que des festivités pour célébrer cette période semblaient s'y dérouler.

Tout d'abord, revenons sur les croyances japonaises autour de O-bon. Il est dit qu'à l'occasion de cette période, les morts reviennent sur terre. Cela n'a rien d'effrayant, les âmes des défunts veillent sur nous, alors pensons à eux qui sont de retour parmi nous pour les remercier voire leur passer un message. Aux environ du 15 Août, le point culminant est la date de leur retour quelque part dans l'au-delà, date qu'il ne faut pas rater pour les raccompagner comme en signe de gratitude.

Kyoto, ville non bombardée en 1945 contrairement à l'ensemble du reste du pays, conserve l'âme d'une ville du Japon où la modernité ne semble pas avoir eu d'emprise. Il y a des ruelles avec des habitations en bois et des dizaines ou peut-être bien des centaines (des milliers ?) de temples. Endroit idéal pour venir se recueillir. Des touristes en masses arpentent les lieux bien connus mélangés avec la cohorte de visiteurs étrangers venus passer quelques jours de dépaysement en terre nippone. J'ai entendu parler Français tous les jours au cours de mes pérégrinations.

Qu'est ce qui attire donc tant de monde à venir lors de cette semaine visiter Kyoto. C'est l'évènement appelé Gozan Okuribi en japonais, ou les kanjis des 5 montagnes en feu... A savoir que Kyoto qui ne se situe pas en bord de mer est entourée de reliefs montagneux que l'on aperçoit tout autour de la ville. A 5 endroits dans ce panorama, des caractères apparaissent à flanc de montagne tracés par l'absence de végétation. On les distingue en plein jour lorsque l'on passe proche de ces endroits, mais pour O-bon le 16 août cette fois, on allume des feux à la nuit tombée.

Mais tout commence tout d'abord, le 15 ou au pied de ces montages, un peu par hasard je suis tombé sur un stand qui préparait les bûches qui serviraient à l'embrasement. Ce sont de petits bâtons de bois d'environ 70cm de long que l'on peut se procurer, contre quelques centaines de yens, et inscrire quelques mots. J'avoue je ne me suis pas renseigné plus que cela sur la signification de ce que les gens écrivent au pinceau sur une face du morceau de bois. Toujours est-il qu'ensuite ils sont rassemblés et liés pour en faire une belle souche de bon bois pour faire un feu.

Le 16, temps pluvieux ou pas c'est le grand jour, heureusement la pluie n'est pas tombée ce soir-là. Le programme prévoit qu'aux environs de 20h le premier kanji, le grand signe Dai qui signifie grand, important, situé au-dessus du temple au pavillon d'argent est embrasé, suivi successivement par les 4 autres emplacements à 5 min d'intervalle à chaque fois pour une durée d'illumination prévue d'une demi-heure. Autrement dit à 20h50 c'est terminé, faire le tour de la ville est inenvisageable.
Plusieurs lieux d'observation sont indiqués aux 4 coins de la ville. Il y a bien quelques fenêtres en haut de la gare ou de la tour de la ville mais cela m'étonnerait que ce soit accessible si ce n'est pas fermé au public. Reste un parc gratuit au Nord de la ville un peu surélevé d'où il semble possible de voir 4 des zones. Ça a l'air très prisé au vu des avis et photos sur le web.
J'opte pour la solution de repli, un angle de vue correct sur le premier kanji allumé depuis les allées de l'ancien palais impérial. Elles ne sont pas éclairées la nuit, je ne serai donc pas gêné par des parasites lumineux éblouissants : phares, immeubles, signalisation. J'ai ainsi pu prendre quelques photos de piètre qualité entre 20h et 20h15.

Vite, vite, un autre spot pour tenter d'observer d'autres signes. J'avais repéré un embranchement de la rivière à quelques centaines de mètres de là qui est bien réputé. Je ne suis pas le seul à être dans la confidence, c'est juste blindé de monde qui marchent lentement alors j'y arrive bien tardivement selon moi malgré ma précipitation. C'est la cohue, de plus avec les orages ayant eu lieu les jours précédents, les bords de la rivière devenus dangereux sont interdits, la circulation est contrôlée par la police. Il est notamment interdit de s'arrêter sur les ponts, là où on voit le mieux. Je réussis l'espace de quelques secondes à jeter un regard sur 2 autres kanjis mais ce sera tout.

J'ai envie de dire tout ça et tout ce monde juste pour ça. Non pas que cela ne vaille pas la visite mais quel évènement déceptif. Moi qui naïvement avant de me renseigner pensais voir une sorte de retraite aux flambeaux où en début de soirée des gens défileraient avec les bûches... Rien de cela juste une lumière impossible à photographier à 2 kms de là dans la montagne sombre. Obon à Kyoto, c'est vu.